Massif de l'Ausangate
4600m. Des éclairs zèbrent le ciel. Les yeux rivés vers le col Jampa 500m plus haut je regarde, inquiet et impuissant, la neige se mêler à mon expédition... Réfugié sous l'avant toit d'une bergerie en terre apparue par magie, trempé, j'essaie de réfléchir. J'ai progressé de moins de 40km en 2 jours. Les infos GPS que je suivais sont fausses et je navigue à vue. Combien de temps la tempête va t elle durer? Il n'ya pas de sentier et les repères au sol s'estompent peu à peu. Franchir le col sous la neige serait complètement inconscient... Redescendre, retrouver le sentier, puis la piste, longer la rivière Urubamba et contourner le massif? Le col est là, juste un peu plus haut, et le détour fait près de 150 km. Redescendre est il plus prudent? Le souvenir des quelques sueurs en poussant le vélo dans les pierriers ne me réjouit guère plus... Je savais, en partant il y a deux jours que la fenêtre météo favorable serait étroite, mais il est des jours où quelque chose nous pousse à tenter... Ne sommes nous pas nés pour nous surpasser?
Que faire? Chaque jour son lot de décisions à prendre. La concentration et la lucidité altérées par l'altitude, je décide d'attendre.
Blotti en boule sur un tas de laine mouillée laissé par les bergers, je tire mon chapeau sur le visage et laisse la fatigue et le doute m'endormir. Pour la première fois depuis une éternité, je me prends à rêver d'une paire de bras dans laquelle m'abandonner et me réfugier. Avoir le droit de faiblir, se laisser réconforter et , le temps d'un instant, ne plus rien gérer...
Réveil en sursaut. Le vent a tourné, les flocons envahissent mon recoin de fortune et me tirent de ma rêvasserie. Un coup d'oeil furtif et instinctif vers le vélo. Où suis je? Toujours seul sur mon tas de laine qui refoule. Recroquevillé au mieux contre le mur, j'observe. L'orage semble se calmer, la mince couche de neige ne tiendra pas longtemps, le ciel semble s'éclaircir un peu... Feu. c'est maintenant.
Je pousse le vélo droit dans la pente glissante, zigzagant entre les pierres, franchis par deux fois un torrent pieds nus. Plus rien ne compte , à part ces ailes qui semblent avoir poussé et mettent l'impossible à portée de main...
Passant la ligne d'une crête, un rayon de soleil vient percer l'épais manteau nuageux. Le rideau s'ouvre subitement, les sommets à 6000m se révèlent, surplombant une prairie d'altitude parcourue par les eaux des glaciers. Assis sur la crête, je fais face à des centaines d'alpacas broutant dans l'air silencieux du soir. L'instant vaut plus que toutes les galères du monde.
J'aimerai être un 6000, un géant profondément enraciné en terre, et la tête toujours dans les nuages...
Minuit, l'altitude me broie le crâne, le froid vient encore me tirer du sommeil, et le mode survie m'empêche de me rendormir. La nuit est interminable, mais qu'importe. J'approche le point culminant du voyage, l'euphorie, la solitude sauvage et l'excitation me bercent loin au delà de l'inconfort. La tente s'ouvre une fois de plus sur un horizon spectaculaire. Les glaciers baignent dans le soleil matinal. Assis sur une butte à quelques pas de mon camp, Je souris en pensant à la complexité de nos sociétés... Je regarde de loin ma tente et mon vélo si minuscules. C'est là tout ce que je possède. Un univers pliant à déployer où le vent me mène. Ces 15kg de matériel répartis en 2 sacoches suffisent à pourvoir l'autonomie et le confort d'une année peu importe les aléas. Ce peu de choses me permet d'atteindre les coins les plus reculés de notre planète, d'y survivre et d'en repartir par mes propres moyens. Tout cela est il réel?
Travel light, live light, spread the light, be the light
Une caravane de chevaux chargés approchant au loin me tire de ma réflexion. Je distingue un groupe de trekkeurs. Je les rattrape au sommet du col. Les pauvres sont décontenancés. Ici, à plus de 5000m au Pérou, ils viennent de se faire doubler par un mec poussant son vélo chargé... On discute un moment en échangeant quelques victuailles. Ils sont suisses, vaudois, et je m'amuse encore de leur tête en apprenant qu'ils sont clients du restaurant ou je travaille à Verbier... J'enfourche enfin mon vélo. Dévaler les pentes vertigineuses de l'Ausangate en mode singletrack sous les glaciers donne l'impression de voler. Je partage mon plaisir avec un chien de berger qui me suit depuis 24h... Au hameau, les sources d'eau chaudes naturelles sont un cadeau pour le corps et l'esprit.
- Sur les chemins de St Jacques -
Parfois une antenne téléphone, bien cachée dans le paysage,
me dépose sous la tente un message.
Mon petit frère, mon gamin, est parti lui aussi sur les chemins.
Est ce seulement un hasard si nous partons chacun
défleurer notre divinité sur les routes du monde,
En direction de notre propre Santiago,
L'un vers compostelle par les chemin de France et de Navarre,
L'autre vers le Chili, par l'altiplano et les salars...
-Sur le chemin du village-
Un paysan m'arrête. Il a le genou enflé et me demande si j'ai une pharmacie.
Je lui offre mon tube de pommade.
Son petit garçon, jusque là bien caché me saute dans les bras et me fait un bisou.
Je viens de sauver son papa.
- Parenthèse vers la Selva -
En quelques heures je dégringole de près de 4500m,
Tel un condor s'élançant des sommets de la cordillère pour plonger vers la jungle,
Je vois les Andes devenir Amazonie, La Sierra devenir Selva.
Je passe subitement du brouillard enneigé à la chaleur moite,
retrouve les couleurs, les odeurs, et tous ces bruits étranges.
Comme un enfant, je fais la course avec un papillon bleu géant.
- San Lorenzo - Ancres -
Assise à l'ombre de sa cahute en bord de route, une grand mère me fait signe.
Nous échangeons quelques minutes, je lui achète un refresco et quelques bananes fraîchement cueillies.
Telle un Ancre immobile, dans l'océan de la la vie, elle sourit, puis me serre dans ses bras.
"Reviens me voir un jour, souviens toi, tu me trouveras ici, à San Lorenzo"
Est ce nous qui traversons la vie? Ou est ce la vie qui nous traverse?
Recueilli à la nuit, pour éviter la pluie, une équipe d'ouvriers m'invite dans leurs quartiers.
Une usine avicole, gérée par une poignée de gamins.
L'ambiance pourtant fraternelle laisse transpirer la dure réalité.
Au mur des dortoirs, des photos des familles
L'exil forcé peut il racheter le temps écoulé?
Parfois une antenne téléphone, bien cachée dans le paysage,
me dépose sous la tente un message.
Mon petit frère, mon gamin, est parti lui aussi sur les chemins.
Est ce seulement un hasard si nous partons chacun
défleurer notre divinité sur les routes du monde,
En direction de notre propre Santiago,
L'un vers compostelle par les chemin de France et de Navarre,
L'autre vers le Chili, par l'altiplano et les salars...
-Sur le chemin du village-
Un paysan m'arrête. Il a le genou enflé et me demande si j'ai une pharmacie.
Je lui offre mon tube de pommade.
Son petit garçon, jusque là bien caché me saute dans les bras et me fait un bisou.
Je viens de sauver son papa.
- Parenthèse vers la Selva -
En quelques heures je dégringole de près de 4500m,
Tel un condor s'élançant des sommets de la cordillère pour plonger vers la jungle,
Je vois les Andes devenir Amazonie, La Sierra devenir Selva.
Je passe subitement du brouillard enneigé à la chaleur moite,
retrouve les couleurs, les odeurs, et tous ces bruits étranges.
Comme un enfant, je fais la course avec un papillon bleu géant.
- San Lorenzo - Ancres -
Assise à l'ombre de sa cahute en bord de route, une grand mère me fait signe.
Nous échangeons quelques minutes, je lui achète un refresco et quelques bananes fraîchement cueillies.
Telle un Ancre immobile, dans l'océan de la la vie, elle sourit, puis me serre dans ses bras.
"Reviens me voir un jour, souviens toi, tu me trouveras ici, à San Lorenzo"
Est ce nous qui traversons la vie? Ou est ce la vie qui nous traverse?
Recueilli à la nuit, pour éviter la pluie, une équipe d'ouvriers m'invite dans leurs quartiers.
Une usine avicole, gérée par une poignée de gamins.
L'ambiance pourtant fraternelle laisse transpirer la dure réalité.
Au mur des dortoirs, des photos des familles
L'exil forcé peut il racheter le temps écoulé?
L'itinéraire traverse de nombreux villages vivant au rythme des mines à ciel ouvert. puis m'apparait une ligne imaginaire.
Je roule sur une forntière.... Là sur cette ligne droite sans fin, à droite, le pérou, à gauche, enfin, la bolivie.
Je roule sur une forntière.... Là sur cette ligne droite sans fin, à droite, le pérou, à gauche, enfin, la bolivie.
4300m, piégé par la nuit, le vent me gèle les doigts,
Il fait froid à en perdre une phalange.
Couvert au mieux, la grêle me cingle le visage.
Et ce village au loin sur lequel j'ai misé depuis 20km et qui semble ne jamais se rapprocher,
Dans quelques instants l'espoir d'un toit et d'une soupe.
Qu'y a t-il de plus délicieux que la magie de ces instants qui précèdent la délivrance?
A la station essence on me loue pour 2$ des quartiers tout confort.
Ce soir dormant sur des planches, blotti sous les vieilles couvertures en laine puant la sueur et la bière,
Je m'endors et souris, en écoutant dehors tomber la pluie...
- Suivre le fil -
Le groupe whatsapp est comme un fil invisible sur lequel nous marchons tous. On se suit on partage,
Moi qui ai toujours fui la technologie, je profite de ce merveilleux outil.
Nous sommes une centaine de cyclistes réuni autour du même rêve, pédaler les amériques.
Sous la tente, parcourant les messages, je vois défiler ceux qui se lancent, ceux qui tirent leur révérence, je découvre des galères, des itinéraires, de l'entraide, du partage, et surtout, le moyen de partager avec d'autres qui peuvent comprendre, la magie de ce que nous découvrons et expérimentons.
A Moho, j aperçois les premiers reflets du Titicaca.
Sur la place du village je rencontre Isa, jeune étudiante française. Depuis mon banc, je l'observe faire, avant de l'interpeler et de l'écouter conter. Isa voyage sans utiliser d'argent. Elle flâne sur les marchés, et contre ses histoire, se fait offrir quelques fruits abîmés, dans les boulangeries contre un fruit elle troque du pain, qui lui servira à payer un restaurant ou un autobus. Elle raconte ses rencontres et expériences toutes plus incroyables et profondes. En l'écoutant, je me revois 10 ans en arrière, voyageant un peu de la même manière. Je lui offre un petit déj au marché, et un billet de 20 euros. Gênée, elle voudrait ne pas accepter. Elle le prend lorsqu'elle comprend que ce que je lui tend est bien plus que de l'argent. Je lui offre le souvenir de ce que nous sommes, le souvenir que nous n'avons pas besoin de ce papier après lequel tant de monde court tant. L'argent, la drogue des gens sans imagination... oui il aide mais n'est qu'un outil, qu'un moyen, nous savons tous deux qu'en nous ouvrant, en osant la rencontre et l'échange, nous avons la capactié de créer, alors la vie pourvoit à tout ce dont nous avons besoin...
J'ai transformé ma vie pour en gagner beaucoup en peu de temps, et en jouant. Le travail n'est pas pour l'argent mais pour le jeu, et l'argent il faut qu'il serve, et s'en détacher.
Je trimballe une liasse de 1000 balles en petites coupures. Au delà de mes besoin les plus simples chaque jour, cet argent est destiné à servir. J'ai fait voeu de m'en détacher. Qu'ils s'envolent un par un comme des oiseaux m'allégeant et me libérant allant accomplir surprises et miracles çà et là. L'argent va et vient, il tourne il danse...
Je me souviens de mes jeunes années où j'ai tant reçu, et aujourd'hui, lors de ce voyage, je me réjouis de pouvoir régaler tant d'inconnus, accomplir des petits miracles, des petites attention, créer des surprises... Ce qui n'est pas donné est perdu...
Sur les bords du lac, pouce tendu, un camion de chantier emmène Isa vers la bolivie.
Après la rudesse de la cordillère, le lac, majestueux, offre un peu de douceur, dans les lumières, dans le climat, dans les humeurs.
Un genou récalcitrant me demande à ralentir. Je ne roule plus que 15km par jour, pousse plus que je ne pédale, mais, têtu, je tiens vraiment à passer la frontière à vélo. Je pousse le vélo sur les pistes d'un dernier col frontière désert. Au sommet, assis sur la borne, le cul entre deux pays, je goûte au silence et la puissance du lieu
A Tilali juste avant le bureau des douanes, je bifurque sur la péninsule. Une forêt de jeunes eucalyptus surplombant le lac m'offre un ultime bivouac panoramique sur les rives du Titicaca. Mon feu crépite devant l'immobilité du grand miroir etoilé.
Huachuma s'invite dans la douceur de la nuit. Sa présence m'est familière. Posant sa paume sur mon coeur, murmurant sa sagesse millénaire dans les flammes, rieur et malicieux, il ouvre une brèche et me porte vers les secrets du subsoncient...
Ils se nomment huachuma, hicuri, derrumbos... qui sont ils ces gardiens des sagesses ancestrales qui guident les hommes à travers les millénaires?
"Médecine de nos ancêtres descendez ici sur terre,
Que l'on s'elève de tout notre être pour atteindre les plus hautes sphères,
C'est ainsi que l'on se guérit, par le pouvoir de la prière."
Retour décidé
regard en arrierre, 40000km le tdm de mon enfance
je repense au garcon peureux et timide que j etais...
le tdm tu n y arriveras jamais, tu n es pas sportif , la vie c 'est pas ca, blablabla
ou serai je interieurement aujourdhui si j avais ecouté les voix qui ne sont pas les miennes?
Je porte dans mon escarcelle les sourires, les regards, les secrets, des belles filles, enfants, des vieillards.
Je porte les etreintes d'espoir, les cris de douleurs de chacun. C'est un peu l'humanité qui vit en moi
Sommes nous un ou